Roms en France. La presse fait écho aux débats du 22 mars 2017: Politis (23/03/17)

Le souhait d’une politique globale pour l’intégration des Roms

par Malika Butzbach

« Pourquoi ne seraient-ils pas intégrables ? » C’est le titre, volontairement provocateur, d’une rencontre organisée le 22 mars par la sénatrice Esther Benbassa. L’occasion d’insister sur le rôle des politiques publiques dans le processus d’intégration des populations roms.

« Nous n’avons pas réussi à changer la situation au niveau national. » C’est sur ce constat sans appel qu’Esther Benbassa, sénatrice EELV, a ouvre la rencontre « Pourquoi ne seraient-ils pas intégrables ? », sur les Roms, qui s’est tenue au Sénat mercredi 22 mars. Cependant, précise-t-elle, il existe des expériences positives au niveau local.

Bien sûr qu’il n’y pas que du positif, il y a aussi les expulsions, les discriminations anti-Roms… Mais on a besoin de ces exemples positifs.

Un de ces exemples, c’est la ville de Strasbourg. Elle est d’ailleurs le centre du colloque puisque l’après-midi commence avec le visionnage du film documentaire d’Anthony Foussard, Roms en France : pourquoi ne seraient-ils pas intégrables, qui décrit la politique d’intégration volontariste de la ville. Sur l’écran, des acteurs municipaux expliquent leurs démarches et des familles roms témoignent. Le message est clair : « Les Roms, tout en gardant leur spécificité, peuvent trouver leur juste place dans la communauté nationale. » Une réponse à Manuel Valls qui avait affirmé, en 2013, que « les Roms ont vocation a revenir en Roumanie et en Bulgarie ».

Citoyens de seconde zone

Suite au film, les intervenants sont invités à réagir. Ils pointent tous la nécessité d’une politique globale sans laquelle ces initiatives restent fluctuantes. « Les Roms sont les oubliés de l’histoire, mais aussi des politiques publiques », rappelle Anne Souyris, coprésidente du groupe EELV du Conseil de Paris. Car ces personnes, citoyens de seconde zone et qui n’entrent pas dans les catégories de migrants non communautaires, sont maintenues à la marge du système social.

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L’adjointe au maire de Strasbourg en charge des solidarités, Marie-Dominique Dreyssé, témoigne de la démarche de sa municipalité. « Le fait est que nous avons pris du temps : il nous fallait tout inventer. C’est le contraire de la logique d’urgence dont usent certains politiques, comme les préfets qui parfois, ne jouent pas le jeu. »

Sans volonté politique, pas d’espoir

Pour Francois Loret, de l’association Romeurope, c’est indéniable : « Il y a un manque de courage politique sur le terrain. » Face à l’unanimisme du rejet des populations roms, les élus locaux ne prennent pas le « risque » de l’intégration pour éviter de perdre des voix… Liliane Hirstach, Rom ayant quitté la Roumanie en 2004 témoigne « S’il n’y a pas de volonté politique, les familles n’ont plus d’espoir. C’est le cas pour la scolarisation des enfants par exemple. Que voulez-vous dire à des parents qui veulent que leurs enfants aillent à l’école ? Que les maires ne veulent pas les inscrire ? » Elle regarde sa fille qui est assise dans le public.

Moi c’est la scolarisation de ma fille qui m’a permis de sortir de cette situation. Car ce que vous avez vu dans le film, je l’ai vécu.

Un exemple qui marche « au moins un peu »

Le débat commence dans la salle comble : les 120 spectateurs hèlent les intervenants invités. Parfois moins consensuels. Un Strasbourgeois prend le micro pour dénoncer le caractère de « propagande » du film. « Il y a ce couple de jeunes qui ont travaillé plus de quatre mois et qui n’ont pas eu de logement. Je crois même qu’ils ont fini par trouver leur appartement tout seuls. La « mission Roms » de la mairie est très discutable. » Peut-être avons-nous besoin de cet exemple qui marche « au moins un peu », lui rétorque-t-on. Au fur et à mesure de l’après-midi, des voix s’élèvent et parfois le ton monte. « Beaucoup de bruit, rigole Anne dans le public. Il faudrait rappeler que les Roms dans les bidonvilles représentent moins de 20 000 personnes. C’est peu et malgré ça, les autorités refusent la solution d’une politique nationale. »

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